Témoignages

Un projet pilote iPad pour des pionniers …

Luc Viatour, personne-ressources à l’Institut Saint-Joseph de Ciney, a été lauréat du premier appel à projet École Numérique: grâce au dossier qu’il a rentré, l’école a reçu des malles d’iPad (± 60 tablettes). Après quelques mois d’utilisation, nous l’avons interviewé.
Comment et pourquoi la décision d’intégrer les iPad a-t-elle été prise dans votre établissement ? Avez-vous été concerté ?
Je suis un prof indépendant. Et la direction me laisse travailler dans cette indépendance. Elle sait que les projets menés le sont toujours dans le bien de l’école et des élèves; j’ai donc décidé tout seul de remplir le premier appel «école numérique», et de le présenter. J’en ai averti mon directeur lorsque le projet a été déposé. J’avais envie de moderniser ma façon de donner cours, j'en avais marre des cours magistraux, je voulais de l’action pour mes élèves afin qu’ils développent leur autonomie tout en respectant leur rythme d’apprentissage.

De quel accompagnement ou soutien avez-vous bénéficié ?
Je suis personne-ressource à l’école. Je suis également ADE, et formateur pour l’asbl de formation Interteam, qui oeuvre dans la formation aux TIC en éducation. Je n’avais donc pas besoin de formation, puisque je domine ces problématiques. Le soutien reçu fut celui des collègues d'Interteam et de mes collègues de l’école, qui m’encourageaient à continuer.

Quelles difficultés avez-vous rencontrées avec le matériel ?
Aucune? J’avais bien étudié la problématique des recharges et des synchronisations; nous avions donc directement opté pour la malle Magellan 24 de Kallysta. Elle simplifie vraiment la vie des personnes responsables d’un parc d’iPad.

Avez-vous constaté une modification du comportement des élèves lors du travail avec l’iPad ? Quel est le climat de classe ?
Les élèves sont vraiment devenus des acteurs de leur formation. Ils travaillent à leur rythme. Et c’est vraiment extraordinaire de les voir travailler, concentrés, seuls sur une matière donnée. Le silence règne, la concentration est maximale. La compréhension optimale.

Quelle organisation de classe faut-il mettre en place pour optimiser l’utilisation de l’iPad ?
Il faut donner des consignes claires et précises. Par exemple, l’iPad ne quitte pas la table. Mais il faut aussi établir des règles. Chaque élève reçoit toujours le même iPad. Il en est responsable. S’il y a un problème (ce qui n’est jamais arrivé) il en sera tenu pour responsable.

Depuis que vous utilisez l’iPad, avez-vous modifié votre cours, vos pratiques ? Pédagogiquement, qu’implique l’intégration des iPad dans la classe ?
Bien sûr, mon rôle de prof s’en est trouvé transformé. Je suis devenu un conseiller, un guide dans les apprentissages des élèves. Les feuilles de cours sont peut-être toujours les mêmes, mais l’animation de classe est toute différente.

Qu'est-ce que l'iPad permet et que l'on ne pouvait pas faire auparavant ?
L'iPad ne fait rien de mieux. On peut donner des cours nuls avec un iPad; Il faut considérer l’iPad comme un outil supplémentaire. Un outil qui permet de développer l’autonomie de l’élève, qui permet de respecter ses rythmes d’apprentissage, mais aussi un outil qui permet au professeur de rester plus longtemps auprès des élèves qui ont des difficultés de compréhension.
L’iPad nous a permis, à Valérie Beguin de Champion et à moi de mettre au point une méthode de classe inversée; Un site web est né; Il est utilisé cette année par tous mes collègues de 3e, mais aussi par plus de 1000 utilisateurs différents chaque jour.

Quelles sont les applications qui le permettent ?
J’en retiendrai 4 ou 5 en math:
- mathination, l’application qui m’a fait comprendre que l’iPad est un outil formidable en terme d’individualisation;
- Showme, un logiciel de « tableau blanc », basique, mais tellement simple à utiliser, que les élèves créent eux-mêmes leurs propres vidéos explicatives;
- Steps2math dans la même idée que mathination, mais complémentaire;
- Géogébra sur iPad, le célèbre logiciel de géométrie qui est une révélation sur iPad;

Quel est le point fort de l’iPad ? et son point faible ?
Il obéit du bout du doigt, est d’une convivialité et d’une ergonomie magnifique. Après 3 ans, les batteries tiennent toujours 10h sans problème.
Des points faibles, un seul point faible? Je n’en vois pas.

Pouvez-vous déjà donner des exemples d'activités en les mettant en relation avec les compétences à travailler ? 
Je vous invite à visiter le site mathinverses.weebly.be pour retrouver non pas une ou deux activités, mais des dizaines d’activités mathématiques.
Dans les autres branches, on utilise l’iPad pour des créations de bandes dessinées, de 4e de couverture, de présentations multimédias qui font appel à la compétence savoir écrire que ce soit en français ou en langues étrangères.
On peut aussi utiliser l’iPad pour la compréhension à l’audition.

Pouvez-vous évaluer les impacts sur les résultats scolaires (si oui, comment avez-vous procédé pour comparer) , la motivation ?
On ne peut jamais comparer une classe d’une année avec une autre classe, quelle que soit l’année. Les élèves sont différents. Mais je vois les yeux des élèves briller lorsque l’on parle de math. Lumière qui s’était éteinte avec leurs difficultés; l’iPad les aide à voir les math autrement, à les comprendre, à les aborder pour les comprendre plutôt que pour les réussir comme on réussit une recette de cuisine sans comprendre ce qui se passe. Cette lumière dans leurs yeux éclaire ma carrière de prof et me donne envie de continuer à les motiver avec un iPad ou avec les classes inversées.

Envisagez-vous de poursuivre l’expérience avec l’iPad ?
Bien sûr. Qui voudrait arrêter avec des résultats pareils? Avec des collègues de plus en plus enthousiastes ?
Notre projet pour école numérique 3 a été accepté, nous allons donc continuer à faire avancer le projet de classe numérique dans les autres années, tout en croisant les expériences avec une autre école plus spécialisée en français.

Quels conseils donneriez-vous à un enseignant qui souhaiterait utiliser les tablettes en classe ?  
D’abord, savoir l’utiliser pour lui même, pour son plaisir, pour ses loisirs.
Ensuite, commencer doucement en classe avec des applications qui ne révolutionneront pas ses pratiques pédagogiques, qui permettront de faire autrement des choses qu’il faisait déjà avec un bic et un cahier. Ensuite, penser à développer l’autonomie des élèves en créant des activités plus individualisées. C’est dans ce cadre-là que l’asbl interteam forme des enseignants à Ciney (http://www.inter-team.info/dayclic/2014.html)


Nombre d’élèves dans l’école: 1300
Nombre d’enseignants: 200
Nombre d’iPad: 60
Date de l’installation: janvier 2011

La décision d’intégrer les iPad a bien été accueillie dans mon établissement; directement un groupe de 13 ou 14 profs s’est constitué, s’est formé. Les membres ont acquis un iPad et l’utilisent dans leurs cours. Les freins à l'utilisation de l'iPad par certains enseignants sont la peur de la technique, la peur du futur, la peur de la perte de leur rôle de magister, la peur de perdre leur aura, leur autorité, de ne pas tout dominer.
Nous avons informé les parents en les intégrant dans le processus d'adoption : des lettres de présentation du projet ont été envoyées, des réunions ont été organisées. Les parents sont enchantés.
Si je devais donner un avis à un directeur d'établissement qui envisage d’intégrer l’iPad dans son établissement scolaire, je lui dirais: osez, et formez !


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